Il fallait que je le fasse. J’aurais sûrement pu trouver une autre solution pour honorer sa mémoire. En plus, rien que l’idée de le faire me donnait des sueurs froides. Il faut dire que je ne suis pas une grande amatrice d’aiguilles et encore moins de douleur. Mais je devais le faire.
Pour elle ? Non, pas vraiment. Pour moi ? Sûrement. C’était une thérapie contre la tristesse. Mais aussi un moyen de l’avoir éternellement avec moi.
Elle m’avait sauvée. Elle m’avait réconciliée avec la vie. Si nos routes ne s’étaient pas croisées. Je serais sûrement encore bercée par mes larmes, souhaitant que la grande faucheuse m’embrasse de son baiser mortel.
Dire qu’il y a, à peine, quatorze ans, je m’écorchais la peau à vif chaque soir, car je n’arrivais pas à supporter mes tocs.
Dire que je me détestais au point de vouloir mourir, sans avoir le courage de poser une lame sur ma gorge.
C’était le passé, un horrible passé, que je ne souhaite à personne. Sans elle, j’aurais sûrement fini dans une maison de fous ou pire encore.
Elle a été mon espoir. Celle qui me faisait rire quand mes yeux devenaient larmoyants. Celle qui m’écoutait quand j’avais besoin de parler. Celle qui pouvait me rassurer, me guider.
Sa personnalité prenait tellement de place, que je devais mettre de côté mes habitudes pour pouvoir gérer son énergie.
Aujourd’hui… pourrais-je vivre sans elle ?
Ne vais-je pas retomber malade ? Redevenir fragile ?
Je ne l’espère pas. Non ! Je ne dois surtout pas redevenir ce que j’étais. En sa mémoire, je dois vivre comme elle me l’a appris.
Pour ne pas oublier ces moments de joie, pour ne pas me perdre. Je devais faire ce tatouage.
Je savais que ce sera douloureux, toutefois, ça ne l’a pas été autant que le moment où j’ai vu ses yeux se fermer pour la dernière fois sur ce monde.
J’aurais voulu la sauver. Si j’avais pu, j’aurais donné mon âme au diable pour la faire vivre une année de plus.
Si elle savait, le jour où elle est partie comme j’ai haï ce monde. Lui qui tournait toujours, alors qu’elle n’était plus. Les gens riaient, vivaient, alors que j’étais morte avec elle.
Mais je vous rassure, aujourd’hui, je vais un peu mieux. Des mois sont passés et mon cœur a un peu cicatrisé. Même si la simple mention de son nom me fait encore fondre en larme.
J’arrive à me lever le matin, à travailler, à dormir, et parfois à sourire.
Certaines personnes ne comprennent pas mon geste : pour quoi se faire tatouer son portrait ?
Elle n’était pourtant qu’un simple chat.
Peut-être. Mais elle était mon chat. Mon rayon de soleil.
Celle qui m’a fait me dire : « C’est bon d’être en vie ».